« Le Groupe Technicolor a coupé une branche malade trop tardivement » Eric Groud, président de la CCI 49

Interview. Technicolor, TV locale d’Angers, situation des entreprises, réforme des auto-entrepreneurs : entretien avec Eric Groud, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Maine-et-Loire.

entreprise-angers.com : Pensez-vous que tout a été fait pour sauver Technicolor ?

Eric Groud : notre rôle à la CCI n’est pas de distribuer les bons et les mauvais points. Tous, élus, direction de Technicolor, acteurs de la filière électronique , nous nous sommes réunis à plusieurs reprises autour du préfet pour trouver collectivement des solutions. On a mouillé  notre chemise mais force est de constater que l’économie évolue. Aujourd’hui, il n’y a plus de place pour la production de produits électroniques grand public sous nos latitudes. Ce qui se passe chez Thomson, Ce fut le cas avant pour d’autres productions : chez Bull, NEC, dans le Choletais, ou chez Motorola

Pensez-vous que Technicolor  a tenu son rôle ?

C’est un dossier compliqué. Pour aider le repreneur, il aurait fallu fournir une charge de travail suffisante pour assurer la transition. Or il n’y a plus de travail. Le dossier Technicolor n’a sans doute pas été pris par le bon bout. Aujourd’hui, ce groupe, qui a des difficultés financières a coupé une branche malade mais sans doute trop tardivement. Il y a deux ans, il aurait été plus facile de trouver des alliances avec des repreneurs car il y avait à l’époque encore de l’activité. Regardez ce qui c’est passé avec Motorola, le repreneur a été accompagné jusqu’à ce qu’il atteigne son point mort. Le dossier a été anticipé et la restructuration a pu se faire.

Quel est le rôle de la CCI dans ce type de dossier ?

La CCI se doit d’accompagner les mutations structurelles des filières. Concernant l’électronique, nous avons, avec un cabinet de consultants, réfléchi à son évolution. Nous nous sommes rendu compte que la production grand public n’avait pas d’avenir contrairement à la production professionnelle. Nous avons donc fédéré les acteurs de l’électronique et donné naissance à un cluster. Aujourd’hui, nous avons une expertise réelle dans ce domaine et sommes reconnus. Nous avons développé une plateforme  (Astrium) et nous avons  la volonté désormais de créer un campus autour de l’ESEO, le Techno Campus Electronique.

Sur la TV locale, quelle est votre position et celle de la CCI ? (un dossier de candidature a été déposé auprès du CSA par la Ville d’Angers et l’Agglomération pour la création d’une TV locale. NDLR)

Un projet de TV locale dans une ville comme Angers fait sens. C’est un projet intéressant. J’ai seulement regretté d’avoir été sollicité seulement 10 jours avant le dépôt du dossier. Nous n’avons eu que très peu de temps pour répondre  et apporter notre réflexion. Concernant la ligne éditoriale, je souhaite que la rédaction soit libre et indépendante. Par ailleurs,  nous nous interrogeons sur l’intérêt qu’il y aurait eu à créer une TV départementale. Cela nous aurait permis par exemple de signer des partenariats  avec d’autres TV  comme celle de Cholet et de mutualiser des programmes.

Vous ne serez pas au capital ?

La CCI n’ pas vocation à rentrer au capital de cette TV locale. Nous soutenons cette initiative, nous accompagnerons des émissions à caractère économique s’il y en a  mais notre vocation s’arrête là. Nous sommes à deux ans d’échéances électorales. Et face au contexte politique angevino-angevin, la CCI reste neutre et ne veut pas être accusée d’avoir une attitude partisane. Et puis nous avons des contraintes budgétaires.

Quel est la situation en cette rentrée des entreprises du Maine-et-Loire ?

Dans 15 jours nous sortirons notre nouveau baromètre sur les entreprises. Mais nous savons déjà que les chefs d’entreprises sont inquiets : les carnets de commandes baissent, les commerces sont impactés par une baisse du budget des ménages et par le e-commerce notamment, le bâtiment souffre, les marges se dégradent, le niveau d’exigence pour les prêts immobiliers monte etc…. La capacité de production des entreprises est actuellement inférieure à 30% à ce qu’elle devrait être.

Quelle spécificité pour le Maine-et-Loire ?

J’aurais tendance à dire que notre département résiste mieux que d’autres en raison de la diversité de son activité, contrairement à d’autres régions où s’est développée  une seule production ou presque, comme dans le Nord. Chez nous, des secteurs perdent des emplois  mais d’autres résistent,  créent et continuent d’investir comme ZachSystem, Stream, Vuitton ou Bouvet. Ce qui est inquiétant c’est le taux de chomage du département (9,8%) très proche du taux national.

Comment jugez-vous la prochaine réforme fiscale qui prévoit une hausse des cotisations pour les auto-entrepreneurs ?

D’abord, ce statut permet d’avoir un travail d’appoint. Il a certes été dévoyé par quelques-uns, mais dans son ensemble il a permis à beaucoup de démarrer une activité sans le frein juridique et administratif. Ce statut est un succès phénoménal. Il a donné lieu à un bouillonnement, il a créé des vocations. Regardez les chiffres, il a une vrai raison d’être. Peut-être peut-on l’améliorer,  mais il est vertueux, il encourage la prise de risque. Cette réforme est une mauvaise décision, incohérente qui va  casser une dynamique. Il va décourager les initiatives. En France, on a une vision insupportable, on est toujours dans le plus punitif alors qu’il faudrait être dans le plus incitatif.

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Journaliste de formation, j'occupe actuellement la fonction de rédacteur au sein du réseau des sites Internet de services aux entreprises du groupe Libbre. Je peux justifier d'une expérience de six ans dans la presse quotidienne angevine au sein de trois quotidiens : la Nouvelle République, Ouest-France puis le journal majoritaire en Maine-et-Loire : le Courrier de l'Ouest (2007-2009).

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