A Trélazé, Hubert Reeves remonte le futur

2 000 personnes se sont déplacées mardi soir à l’Arena Loire de Trélazé, près d’Angers, pour voir et écouter le célèbre astrophysicien écologiste, invité exceptionnel du Centre des jeunes Dirigeants (CJD).

A 82 ans, Hubert Reeves reste un conteur hors pair, de ceux qu’on aime écouter, le soir, au coin du feu. Epousseteur et penseur d’étoiles, infatigable décodeur du big bang et de son mystère originel, ce défenseur acharné de la cause environnementale puise dans son érudition scientifique la force de combattre l’inertie de « ceux qui ne veulent pas voir ». Lorsqu’on lui demande ce qui le conduit à solliciter sans arrêt les pouvoirs publics, écrire des livres, des articles de presse (son « billet de bonne humeur » dans Le Point), à multiplier les conférences sur le réchauffement climatique et la biodiversité, mise à mal par « la destruction des vers de terre qui ne fait jamais le Une des journaux », il répond, dans un sourcillement débonnaire : «Je suis là parce-que mes petits-enfants sont inquiets » (il en a huit).

L’Homme, ce singe intelligent

A Trélazé, la prestation d’Hubert Reeves s’inscrivait dans un long fil rouge visant à tracer une perspective de l’évolution humaine et économique, sur une échelle de  30 ans. Une vision oblique qui nous projetait aux environs de 2050, date à laquelle la population mondiale atteindra 10 milliards d’âmes (contre 7 aujourd’hui), les concentrations d’habitants seront essentiellement urbaines (75%), les automobiles deux fois plus nombreuses (2 milliards), le pétrole rare et cher, et le climat plus chaud (+ 1 à 2 C°).

Depuis les sources denses de l’Univers jusqu’aux étirements cohérents des masses galactiques, impulsés par le Big Bang, l’astrophysicien a brossé, en moins d’une heure, 13 milliards d’années d’Histoire cosmique. Une jolie partition affligée d’un bémol depuis que l’Homme (un singe au départ) ne met plus son intelligence au service de la planète, mais s’ingénie au contraire, à la retourner contre elle, dans une attitude suicidaire : d’origine inconnue, cette mécanique intellectuelle installée dans « une véritable merveille biologique », s’est d’abord « révélée très positive pour la sauvegarde de l’espèce, avant de devenir négative au point de la menacer dans son existence même ». Un danger dont l’acmé a été, selon Hubert Reeves, atteint pendant la guerre froide qui fit régner la terreur atomique, et se poursuit aujourd’hui avec « l’accélération de la destruction de la nature et de la biodiversité ». Il martèle encore : « L’homme a engagé une guerre contre le vivant et notamment contre la nature et s’il la gagne, nous sommes perdus ».

Ou trouver l’espoir alors ? Dans les mains des pouvoirs publics capables de faire « bouger les choses » par la loi, explique le scientifique qui attend beaucoup (trop?) de la Conférence internationale sur le climat, programmée à Paris en décembre 2015. Mais aussi dans ces nouveaux modèles économiques initiés, loin des projecteurs, par les particuliers, les entrepreneurs et les associations que le CJD d’Angers a souhaité mettre sur la scène mardi soir. Des témoignages citoyens, engagés dans l’action et le concret : Maxime de Rostolan, gérant d’une microferme expérimentale en permaculture, Rémy Lucas, concepteur d’une technique de transformation des algues en plastique, Isabelle Delannoy, promotrice de l’économie symbiotique, Yannick Roudault, auteur du livre « l’Alter-Entreprise » .
En 2011, Hubert Reeves avait préfacé le livre « Rebond » signé par plusieurs membres du CJD*.

* Mouvement patronal né dans les années 1930, le Centre des Jeunes dirigeants d’entreprise (CJD) se présente comme un cercle de réflexion et d’échanges au profit des jeunes entrepreneurs. La section angevine, qui compte 74 membres, est présidée par Emmanuel Saulou.

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